[Zoom sur] Blumenau: le plus allemand des clubs brésiliens

[Zoom sur] Blumenau: le plus allemand des clubs brésiliens

MadeinFutsal part à la découverte du club brésilien du Blumenau. Un nom et des valeurs d’un club dans une ville aux racines bien allemandes, dans un pays, quant à lui, bien brésilien.

Nous sommes le 6 septembre 2019, et le célèbre Magnus Futsal du non moins célèbre Eder Lima affronte ce soir, et pour le compte la 1ère phase de LNF brésilienne la formation de Blumenau Futsal, qui joue à domicile. Magnus aura la possession du ballon et l’emportera au final 2 à 0 face au club du sud-est brésilien. Buts de Lima et de Danilo Baron. Une soirée de match somme toute normale, prélude le lendemain à une grande parade à Sorocaba pour le club de Magnus, qui fêtera son 3ème titre mondial en compagnie du chien Magnus, himself.

Au-delà du score, les quelques fans de futsal français qui suivront la rencontre auront (peut-être) remarqué les nombreux drapeaux allemands présents dans les travées du Ginásio do SESI de Blumenau. Sans parler des maillots de l’équipe qui ne sont pas sans rappeler ceux de la Mannschaft allemande, qui, rappelons-le, avait mis une dérouillée en foot à 11 à la Selecao brésilienne lors de « sa » Coupe du Monde à domicile. Et puis Blumenau, ça ne fait pas très brésilien non ? Etrange et curieux de prime abord.

A t-il dit  » Ich will den Ball  » ou « Eu quero a bola » (je veux le ballon) ? Ne vous y fiez pas, nous sommes bien au Brésil !

Même en regardant de plus près le blason du club, difficile de ne pas voir une référence à l’Allemagne. Idem pour les nombreux aficionados du club, s’exprimant en portugais sur les réseaux sociaux, et dont les noms de famille sont à consonance allemande: Zimmerman, Weber, Schussler, Steinback…

L’originalité de ce club, fondé en 2017, et qui aura remporté la Coupe de l’Etat de Santa Catalina, et au niveau de l’histoire de sa ville et celle de sa région. Blumenau Futsal fut fondé lorsque le club omnisports AD Hering, basé à Blumenau, a dissous son équipe de futsal séniors après la saison de Liga Futsal 2015 (ne gardant qu’une école de futsal), et ouvrant ainsi une position de franchise qui a été achetée par le nouveau club. Une histoire assez particulière, que revendique aujourd’hui fièrement le club et sa ville.

La team de Blumenau au complet (source: Blumenau)

Blumenau est une ville située dans la vallée du rio Itajai. Une grosse ville même: près de 300 000 habitants. Sud-est du Brésil, dans l’Etat de Santa Catalina, au sud de deux autres villes qui « transpirent le futsal »: Jaragua et Joinville. Les connaisseurs apprécieront. Mais jusque là, rien de plus banal. La géographie ne nous apprendra rien de plus sur ces signes de Germanie apparentes.


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C’est plutôt du côté de l’histoire qui faudra aller chercher. En effet, la ville a été fondée au milieu du 19ème siècle par un pharmacien allemande du nom de Hermann Bruno Otto … Blumenau, à bord du ribeirao da Velha, avec d’autres colons allemands. Il faut dire qu’à l’époque, le dynamisme démographique qui prévalait en Europe ne laissait plus guère assez de terres pour nourrir toute la population. Allemands au Brésil, Italiens en Argentine, Irlandais aux States, Hauts-Alpins de Barcelonnette au Mexique. A la conquête du Nouveau Monde. Il faut dire aussi que cela arrangeait bien le jeune état brésilien, tout juste indépendant du Portugal, et qui, grâce aux plusieurs milliers de colons allemands qui arrivèrent, permirent de sécuriser la frontière, face aux velléités de l’Uruguay et de l’Argentine, qui lorgnaient sur le sud-brésilien.

Cette identité allemande, encore aujourd’hui, imprègne la région et la ville de Blumenau. Ces colonies de peuplement allemandes, dans le Brésil et à Blumenau en particulier, furent prospères, et représentèrent jusqu’à plus de 35% de la population.

Pendant environ 100 ans, jusque dans les années 1950, l’allemand resta la langue prédominante à Blumenau (on parle de lingua franca), avec plus de 80 écoles d’allemands au début du siècle. Les émigrés germanophones et leurs descendants disposaient ainsi d’un « état dans l’état », ne serait-ce qu’au niveau culturel, jusqu’à ce que la politique de l’Estado Novo (1937-1954), sous le président Getúlio Vargas aille jusqu’à interdire l’utilisation et l’enseignement de l’allemand.

Aujourd’hui, la ville et sa région, cultive aisément et fièrement la culture germanique. Maisons à colombage, des répliques de maisons allemandes (la Maison Moellmann réplique de l’Hôtel de Ville de Michelstadt), allemand encore parlé. Blumenau possède même aujourd’hui la seconde fête populaire du Brésil après le carnaval de Rio de Janeiro, l’Oktober Fest, créé en 1983; plus importante fête de la Bière après celle de Munich… en Allemagne, avec plus de 600 000 visiteurs par an. Rien que ça.

Le Castelinho da Moellman dans le centre de Blumenau

Aujourd’hui, de nombreux clubs de la ville, tels qu’à l’image de son blason, revendique ses racines allemandes. C’est donc notamment le cas du club de futsal de Blumenau, présidé par Marcelo Weber, qui porte ainsi sur ses tuniques des références nettes à l’Allemagne.

source: Blumenau Futsal

Si cet article ne vous a toujours pas convaincu, vous pouvez toujours voir à quoi ressemble l’Oktober Fest, ou bien le rythme très bavarois du l’hymne du club:

Aller plus loin: